Depuis juin, les Zimbabwéens ont retrouvé une monnaie officielle, après des années de dollarisation. Au cours du mois de novembre, de nouveaux billets seront mis en circulation. S’ils règlent peut-être le manque de cash dans les circuits économiques, il n’est pas encore certain qu’ils apportent la stabilité tant attendue, selon le consultant zimbabwéen John Robertson. « La question de l’offre monétaire a été compliquée, en raison de la dette gouvernementale. Le gouvernement a augmenté la masse monétaire en émettant des bons du Trésor vendus aux banques, aux fonds de pension et aux compagnies d’assurance. Et cela a multiplié la masse monétaire », dit le consultant. Puis d'ajouter : « Nous avons donc plusieurs milliards de dollars qui sont entrés dans le système par l’effet multiplicateur de ces bons du Trésor. Or l’activité économique globale reste faible. Et pour cette raison, on a vu la valeur de ces bons s’effondrer, car les processus économiques qui auraient dû soutenir leur valeur n’existent pas », détaille John Robertson. ? A écouter aussi : Zimbabwe: créer une monnaie n'est pas si simple Manque d'exportations Toute la question est donc de relancer la production, agricole, minière et industrielle. Mais, désorganisé par l’ère Mugabe et ses désastreuses réformes, l’appareil productif n’exporte pas suffisamment. « Il y a deux déficits structurels. Le premier est causé par le fait que les exportations ne sont pas assez solides, ces dernières années. Et parallèlement, la facture des importations est restée, elle, très élevée, » explique Charlie Robertson, économiste en chef de la banque Renaissance capital. « Donc, il y a une fuite permanente de devises hors du Zimbabwe. Deuxième phénomène, le gouvernement dépense trop, et court derrière le déficit budgétaire. Donc il y a ces deux énormes déficits qui posent problème », affirme-t-il. Un retour aux achats locaux Paradoxalement, l’inflation actuelle et l’effondrement de la nouvelle monnaie, qui depuis juin s’est dépréciée de 90 %, pourraient aider le pays à sortir de l’ornière. « La devise s’effondre si rapidement que le salaire minimum est tombé », prévient Charlie Robertson. « En Afrique subsaharienne, ce salaire tourne autour de 100 dollars par mois, mais ici, il équivaut désormais à dix dollars. Donc, les gens n’ont plus les moyens d’acheter des produits étrangers, et la facture des importations se réduit. Donc, le déficit de la balance des paiements pourrait se résorber en 2020. » Reste que si la compétitivité semble revenir, les Zimbabwéens sont les premières victimes des années de crise. Si le PIB par habitant est remonté ces dix dernières années, le revenu moyen, lui, s’est effondré.
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